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6 janvier 2010 3 06 /01 /janvier /2010 08:37
Article paru dans No Pasaran # 76

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« L’école est une prison », clame Catherine Baker*. Ces mots peuvent prêter à sourire. Pourtant, il s’agit bien d’une privation de liberté, autant physique qu’intellectuelle. Cette année, j’ai effectué ma rentrée dans un nouveau lycée. Étant loin de chez moi et sans ressources financières, je suis donc interne dans ce bunker (murs de 2,5 m, caméras de surveillances, gardiens, etc.)


Chaque matin, à 7h, la lumière criarde des néons suspendus au plafond de la chambre (16 m2 pour quatre personnes) me réveille. Je vais ensuite prendre ma douche (froide) dans une cabine de piscine puis prendre mon petit-déjeuner. Un petit pain, un morceau de beurre fade, un bol d’un café infect et un minuscule gobelet de jus de fruit. Voilà mon premier « repas » de la journée. La sonnerie, une sirène incendie, nous ordonne de rentrer en cours. Nous devons laisser à l’entrée de la classe nos pensées, nos discussions et notre dignité afin d’être totalement réceptifs pour assimiler les valeurs du travail intensif et de la concurrence entre nous. La carotte (les bonnes notes) et le bâton (les sanctions) sont appliqués avec volontarisme par des professeurs plus ou moins zélés. La journée s’écoule ainsi, sonnerie assourdissante puis cours lobotomisant, entrecoupés par le repas de midi, mélange de légumes en plastique et de viande en carton, le tout dans une odeur nauséabonde.


Le soir venu, nous avons la « liberté » d’aller acheter des sodas au hard-discount situé à proximité. La soirée à l’internat n’est qu’une interminable attente. Nous restons allongés, catatoniques, sur nos lits, fixant les lézardes du plafond en écoutant les dernières merdes musicales. Puis vient l’heure du diner, des restes de midi réchauffés. Suite à ce festin, quelques jeunes jouent au foot, pratique encouragée avec vigueur par l’administration scolaire. En effet, quand on est occupé par le sport, on risque moins de réfléchir à nos conditions d’existence… Pour les autres, l’attente continue, jusqu’à la fermeture automatique et centralisée des volets et de la lumière. Toute évasion, même par la pensée, nous est interdite. La nuit s’écoule, dans notre petit lits, jusqu’au lendemain, ou tout recommence.


Soumission, enfermement et déshumanisation sont les maîtres-mots de ce quotidien. Après tout, nous sommes à l’école afin de devenir de braves employés serviles et mal payés, pas pour vivre heureux.

Fabien, lycéen

* Catherine Baker, Insoumission à l’école obligatoire, éd. Bernard Barrault.
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